3 janvier 2015

Lourd bilan pour les sapeurs-pompiers français

L’Etat français a perdu, en seulement dix ans, 46 000 pompiers volontaires, et vu fermer plus de 600 centre de secours. Une crise inédite dans cette profession traditionnellement très populaire.


Ils bénéficient d’une cote d’amour enviable : 99 % de bonnes opinions. Les pompiers, bien sûr. Ils restent pour les Français ces bons samaritains en treillis, ceux qui sauvent les vies, éteignent les incendies et répondent présents 24h/24. Lors des récentes inondations dans le sud de la France, ils ont multiplié les interventions jusqu’à bout de fatigue.Pourtant cette fonction souffre d’une profonde crise des vocations. Début octobre, à Avignon, lors du congrès national des sapeurs-pompiers, la préoccupation était tangible. La France a perdu depuis dix ans 46 000 volontaires. Plus de 600 casernes ont fermé. L’ouverture aux femmes – 14 % des effectifs – n’a pas endigué la baisse. Pas plus que la campagne de promotion lancée en juin par le ministère de l’intérieur.

CAILLASSAGES ET POURSUITES JUDICIAIRES

Le volontariat est la base du système de secours en France. Indemnisés entre 7 et 11 euros de l’heure, selon le grade, ils sont 193 000 à exercer une autre profession. S’ajoutent 40 000 professionnels, agents territoriaux payés par les conseils généraux, 12 000 militaires la BSPP et le BMPM (Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris et Bataillon des Marins-Pompiers de Marseille) et 2 000 hommes de la Sécurité civile.Dans une étude de 2008, 73 % des pompiers affirment s’engager pour rendre service et seulement 36 % pour l’adrénaline. Mais servir son prochain peut aujourd’hui virer au sacerdoce. Les caillassages de véhicules en zone urbaine difficile, les appels pour des interventions bénignes, la dérive vers un rôle de nounou, ont de quoi dissuader.De plus, les SDIS sont de plus en plus remis en cause par les compagnies d’assurances et les pompiers sont de moins en moins protégeaient sur le plan juridique. Nous pourrons citer le cas récent d’un pompier professionnel affecté au SDIS 80, condamné pour homicide involontaire après un accident à un croisement avec un scooter en conduisant un fourgon incendie, lors d’un transit vers une intervention.

UN LIEN FORT AU TERRITOIRE

Mais cette ingratitude est avant tout citadine. « En milieu rural, nous recevons toujours un bon accueil, explique Laurent Rosse, 38 ans, un expert technique dans le secteur automobile, pompier depuis 1995 à La Ferté-Vidame (Eure-et-Loir). Nous avons toujours un merci ou une tape dans le dos. »Et pourtant, dans les campagnes aussi se constate une relative désaffection. Pour le colonel Eric Faure, 53 ans, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, les raisons sont à rechercher dans la société et ses évolutions. « Le volontariat implique une attache forte à un territoire. Or ce lien de proximité diminue. On change plus souvent de lieu de résidence, on travaille loin de son domicile. » La fonction est en outre devenue plus technique. « Avant, on arrivait et on enfilait la tenue. Les anciens indiquaient la marche à suivre dans une logique de compagnonnage. Aujourd’hui, il faut suivre des formations, apprendre les normes. »Les jeunes hésitent également à s’engager sur le long terme (cinq ans renouvelables), d’autant que l’astreinte est lourde.L’Etat espère relancer le volontariat : l’an dernier, François Hollande a promis de faire remonter le nombre à 200 000 en 2017. En attendant ces renforts, les pompiers entendent de plus en plus souvent résonner leurs bip .

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